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Plantes : Quelles espèces ne pas multiplier au jardin ?

Un pot d’herbe de la pampa, offert avec enthousiasme, semblait la promesse d’une élégance sauvage. Deux printemps plus tard, les plumeaux argentés avaient avalé la clôture, défiant désherbants et patience. Certaines plantes ne se contentent pas de pousser : elles s’installent comme des conquérantes, imposant leur règle et leur rythme.

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Qui s’imaginerait qu’une vivace séduisante puisse transformer un havre tranquille en champ de bataille ? Avant de sortir la bêche pour diviser ou multiplier, mieux vaut savoir quelles espèces transforment vite le rêve en cauchemar végétal. Un jardin, ça s’apprivoise, mais toutes les invitées ne méritent pas de s’y éterniser, aussi attirantes soient-elles.

Pourquoi certaines plantes ne doivent pas être multipliées au jardin ?

La multiplication végétative — qu’il s’agisse de bouturage, marcottage, division ou greffage — a de quoi séduire. Un simple fragment de géranium, une touffe de lavande ou un éclat de lierre, et l’on croit détenir le secret de la profusion. Mais cette générosité cache parfois un revers mordant.

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Certaines plantes, d’une facilité déconcertante à multiplier, livrent une vitalité insoupçonnée. Bouturer la menthe, le lierre, ou diviser le miscanthus, c’est souvent laisser la porte ouverte à une occupation en règle. Rhizomes, stolons, drageons : ces experts de l’expansion métamorphosent un massif discipliné en un tapis qui ne connaît plus la mesure, étouffant tout sur leur passage.

  • Bouturage : pour les plantes à croissance fulgurante (menthe, lierre, fuchsia, romarin), un bout de tige posé au sol peut suffire à lancer une invasion.
  • Division : adaptée aux vivaces et graminées, cette technique (bambou, hémérocalle, asters) favorise parfois la monoculture et appauvrit le sol.
  • Marcottages de chèvrefeuille ou clématite : ces tiges enracinées s’échappent vite du massif d’origine, prêtes à conquérir de nouveaux territoires.

La multiplication sexuée (semis) a son intérêt pour renouveler la diversité, mais les méthodes végétatives, en copiant à l’identique, exacerbent la vigueur de certaines espèces. Songez à la progression des mimosas ou des sumacs : ils drageonnent sur plusieurs mètres en un rien de temps. Un jardinier lucide sait doser, multipliant avec discernement pour éviter le chaos et préserver l’équilibre du jardin.

Risques et conséquences : envahissement, maladies et impact sur la biodiversité

La multiplication incontrôlée de certaines espèces, surtout par division ou bouturage, bouleverse l’harmonie du jardin. Vivaces, graminées ou grimpantes, propagées sans réflexion, prennent rapidement le dessus, écrasant les autres. Le phénomène d’envahissement saute aux yeux avec le bambou, la menthe ou le lierre : ils avancent par racines ou stolons, colonisent, épuisent la terre et asphyxient les voisines moins robustes.

  • Diviser à tout-va les hémérocalles, asters ou rudbeckias, c’est laisser ces vivaces monopoliser l’espace jusqu’à rendre tout autre implantation difficile.
  • Le marcottage, si efficace sur le lierre ou le chèvrefeuille, finit par déclencher une expansion quasiment impossible à maîtriser.

À cela s’ajoute le risque sanitaire. Multiplier à partir de plantes déjà malades, c’est disséminer virus, champignons et bactéries dans tous les massifs. Le greffage, effectué sur un porte-greffe vulnérable, peut propager des maladies, surtout chez les fruitiers comme les pommiers, poiriers ou cognassiers.

Enfin, la biodiversité s’en trouve menacée : des espèces trop dominantes, issues de la multiplication végétative, supplantent les plantes locales moins compétitives. Un massif uniformisé n’attire qu’une faune limitée, affaiblit la présence d’auxiliaires naturels et fragilise l’ensemble du jardin face aux parasites. C’est la dynamique du lieu qui se joue à chaque geste de multiplication : mieux vaut y songer avant de multiplier à tout-va.

Zoom sur les espèces à éviter : exemples concrets et explications

Multiplier sans réfléchir des plantes vigoureuses par bouturage, division ou marcottage, c’est parfois allumer une mèche dont on ne mesure pas la portée. Quelques exemples valent toutes les mises en garde.

  • Menthe et bambou : véritables bulldozers végétaux. Leur système racinaire conquérant envahit massifs et pelouses. Diviser ces espèces, c’est accentuer leur emprise et rendre leur contrôle quasiment utopique.
  • Lierre et chèvrefeuille : champions du marcottage naturel, ils étendent rapidement leurs tiges et feuillages, étouffant parfois arbres et arbustes alentour sous leur densité.
  • Rudbeckia, hémérocalle, aster : des vivaces séduisantes à diviser, certes, mais qui finissent par occuper le terrain, au détriment des espèces plus fragiles.

Bouturer le romarin, la lavande ou le fuchsia semble tentant : ces plantes s’enracinent vite et se multiplient sans difficulté. Mais une multiplication excessive, surtout en sol pauvre ou trop sec, donne naissance à des sujets faibles, plus sensibles aux maladies et aux attaques de ravageurs.

Quant aux arbres et arbustes drageonnants comme le sumac, le robinier ou le cornouiller, ils prolifèrent par drageons. Leur multiplication accélère l’épuisement du sol et chasse peu à peu les herbacées locales. Mieux vaut privilégier des variétés non envahissantes ou maîtriser leur développement en les installant dans des contenants adaptés.

plantes indésirables

Alternatives responsables pour un jardin équilibré et durable

Adopter des pratiques de multiplication raisonnée reste la meilleure garantie pour éviter la prolifération des envahissantes et préserver la richesse du jardin. Le bouturage peut offrir de belles réussites, à condition de l’ajuster à chaque espèce et à l’environnement. Privilégiez des substrats légers, bien drainés, et surveillez l’humidité : ni trop, ni trop peu. Astuce : une hormone de bouturage ou un bain d’eau de saule booste l’enracinement, surtout pour les tiges ligneuses.

  • Le bouturage gagne à être réalisé au printemps ou à la fin de l’été, deux périodes où la reprise est optimale pour la plupart des ornementales et aromatiques. Septembre reste un mois stratégique pour garantir la vigueur des jeunes plants.
  • La division convient surtout aux vivaces et graminées. Effectuez-la à la sortie de l’hiver ou au début de l’automne, pour un enracinement rapide avant les coups de froid ou de chaud.

Le marcottage s’adapte parfaitement aux arbustes souples et aux grimpantes. Il suffit d’enterrer une branche sans la séparer du pied mère : les racines apparaissent en quelques semaines, avec un stress minimal pour la plante. Le greffage, quant à lui, se réserve surtout aux fruitiers ou aux espèces difficiles à propager autrement : pratiquez-le en fin d’été, entre mi-juillet et septembre, pour obtenir des plants homogènes et robustes.

Multiplier les espèces, oui, mais dans la diversité : limitez la propagation des plantes au tempérament dominateur, partagez vos boutures avec circonspection et privilégiez les échanges locaux, adaptés à votre sol. Un jardin bien pensé, c’est un équilibre vivant, un théâtre où chaque plante trouve sa place sans écraser les autres. Voilà le secret d’un jardin riche, résilient… et jamais soumis à la tyrannie des envahisseuses.